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Impôt différé actif sur déficits reportables : la comptabilisation est-elle plus stricte en cas de pertes récentes ?

Principe général

Un impôt différé actif (IDA) doit d’abord être reconnu à hauteur des différences temporelles imposables existant à la clôture. Au-delà de ce montant, l’impôt différé actif ne peut être reconnu que dans la mesure où il est probable que l’entité disposera de bénéfices imposables futurs.

Dans le cas où l’entité a généré des pertes fiscales dans des périodes récentes (par exemple, sur l’exercice actuel ou l’exercice précédent), la norme IAS 12 établit une présomption que les bénéfices imposables futurs risquent de ne pas être disponibles et exige que l’entité dispose de preuves convaincantes que les bénéfices imposables futurs seront suffisants pour justifier la comptabilisation des impôts différés actifs. Cette règle s’applique quelle que soit l’origine des IDA, qu’il s’agisse de différences temporaires déductibles (IAS 12.31), de déficits fiscaux reportables ou crédits d’impôt non utilisés (IAS 12.35).

Modalités pratiques

L’entité doit considérer l’exhaustivité des éléments probants disponibles, qui contribuent positivement ou négativement à la démonstration de bénéfices futurs probables et suffisants. L’entité doit ensuite pondérer ces différents éléments probants en accordant plus de poids à ceux qui sont objectivement vérifiables et moins de poids à ceux qui font le plus appel au jugement. Ainsi, plus il existe d’éléments probants défavorables (par exemple, non-renouvellement d’un contrat client profitable), plus il est nécessaire de disposer d’éléments probants favorables pour les compenser.

En particulier, le fait d’avoir encouru des pertes fiscales récemment ne peut être compensé que par des éléments favorables étayés par des preuves convaincantes, c’est-à-dire factuellement vérifiables. Des événements futurs incertains et dépendant de facteurs en dehors du contrôle de l’entité ne constituent pas des preuves convaincantes.

Exemples d’éléments probants favorables ou défavorables

Pour apprécier si les prévisions de bénéfices imposables sont étayées par des éléments suffisamment probants, les indicateurs suivants pourraient être pris en compte :

Robustesse des prévisions

Un budget ou un plan d’affaires ne constituent pas en soi un élément probant.

Un historique d’écarts négatifs et significatifs entre performances réelle et budgétée constitue un élément probant défavorable.

Des hypothèses divergentes avec la performance historique de l’entité, ou avec les données externes disponibles (consensus d’analystes boursiers, prévisions d’experts sectoriels indépendants, etc.), constitueraient également un élément objectivement défavorable, nécessitant d’être compensé par des éléments probants convaincants.

Horizon des prévisions

Plus les prévisions portent sur des périodes éloignées, moins elles sont fiables et moins elles devraient avoir de poids relatif.

Si les prévisions de l’entité indiquent des pertes fiscales dans un avenir proche et un retour à la profitabilité dans un avenir plus lointain, cela constitue en soi un élément probant défavorable.

Origine des pertes fiscales

Un historique de pertes fiscales d’origine récente, et portant sur l’activité principale de l’entité, constitue un élément probant hautement défavorable.

Si l’entité peut objectivement démontrer qu’une perte fiscale encourue a une cause bien identifiée et qui est de nature non récurrente et si, après exclusion de la source de perte, l’entité affiche une profitabilité historique forte et stable, cela pourrait constituer un élément probant favorable.

En revanche, la seule démonstration de la capacité à enrayer les pertes n’est pas en soi suffisante. Il est nécessaire de démontrer la capacité à générer un niveau de bénéfices suffisant pour consommer les déficits fiscaux existants.

Plan de restructuration

Il arrive qu’une prévision de retour aux bénéfices repose sur les économies attendues d’un plan de restructuration. Un plan de restructuration pourrait être considéré comme un élément probant convaincant s’il a déjà été mis en œuvre et a commencé à produire des effets observables ou s’il a clairement éliminé la source des pertes (par exemple, fermeture d’un site non rentable).

Pour un plan non encore mis en œuvre, il est nécessaire qu’il ait fait l’objet d’un chiffrage détaillé et qu’il existe des éléments tangibles corroborant le fait que les économies de coûts attendues sont réalistes et n’affecteront pas la pérennité des revenus.

Un projet de restructuration envisagé mais ne répondant pas aux critères de provisionnement d’IAS 37 ne constitue pas en soi un élément probant.

Un historique de restructurations ayant échoué à permettre le retour à la profitabilité constitue un élément probant défavorable.

Plan de cession

Un plan de cession d’une activité déficitaire répondant aux critères d’IFRS 5 (permettant le classement en actif disponible à la vente) pourrait constituer un élément probant favorable.

A contrario, un plan de cession pour lequel aucun acheteur n’est identifié, ou portant sur des actifs qui ne sont pas cessibles dans leur condition actuelle, ne constituerait pas un élément probant.

Projet d’acquisition d’entreprise

Un projet d’acquisition d’une entreprise profitable constituerait un élément probant susceptible d’être pris en compte uniquement si : (i) l’acquisition a déjà été réalisée ou, à défaut, s’il existe déjà un accord engageant le vendeur et si (ii) l’imputation des déficits existants de l’entité sur les bénéfices futurs de la cible est faisable.

En l’absence d’un accord ferme du vendeur, un projet d’acquisition ne constituerait pas un élément probant.

Date d’expiration des déficits et crédits d’impôt reportables

L’existence de déficits reportables proche de leur date d’expiration constituerait un élément probant défavorable.

En revanche, le fait que les déficits fiscaux soient reportables indéfiniment ne constituerait pas en soi un élément probant justifiant la comptabilisation des IDA.

Sources de revenus futurs

La signature d’un nouveau contrat client significatif ou l’existence d’un carnet de commandes fermes constitueraient des éléments probants justifiant une prévision de revenus.

En revanche, des opportunités commerciales futures dépendant de conditions de marché futures ou d’autres conditions en dehors du contrôle de l’entité ne constitueraient pas des éléments probants.

La perte d’un client ou d’un contrat significatif constituerait un élément probant défavorable.

Nature de l’activité

Le degré de fiabilité des prévisions dépend de la nature de l’activité. Pour des activités en phase de développement ou fortement innovantes, les prévisions ne peuvent pas être considérées comme suffisamment fiables, à moins d’être corroborées par des contrats signés. Dans les secteurs d’activité caractérisés par une forte volatilité ou cyclicité des profits, ce facteur devrait être pris en compte dans l’élaboration de la prévision de bénéfices imposables.

Opportunités de gestion fiscale

Les opportunités de gestion fiscale ne devraient être prises en compte que si elles sont faisables et réalistes en termes de délais, coûts et risques, et si elles sont cohérentes avec la stratégie de l’entité. En sens inverse, des options fiscales qui ne sont pas immédiatement exerçables, ou qui sont entachées d’incertitudes sur leur mise en œuvre ou leurs effets (par exemple, parce qu’elles créent des positions fiscales incertaines au sens d’IFRIC 23), ne constitueraient pas des éléments probants.

Continuité de l’exploitation

L’existence de doutes significatifs sur la continuité de l’exploitation constitue un élément probant défavorable.

A contrario, la démonstration de l’absence de doutes significatifs sur la continuité de l’exploitation ne constitue pas en soi un élément probant favorable.

 

A noter : Décisions publiées par l’ESMA Le régulateur européen a publié plusieurs décisions dans lesquelles un régulateur national a contesté la reconnaissance d’IDA par un émetteur, alors que celui-ci avait généré des pertes fiscales sur les derniers exercices, en considérant que, compte tenu des incertitudes pesant sur l’environnement économique ou sur la faisabilité des restructurations opérationnelle et financière prévues, il n’existait pas de preuves convaincantes (au sens d’IAS 12.35) que l’émetteur disposerait dans le futur de bénéfices imposables suffisants sur lesquels imputer les déficits fiscaux reportables (EECS/0216-14, 01/17 et EECS/0117-11, 04/18).

Recommandations de l’ESMA Dans un communiqué du 15 juillet 2019, l’ESMA a détaillé sa position sur les jugements relatifs à l’activation des IDA et, en particulier, en ce qui concerne la nature et l’étendue des éléments probants à considérer pour apprécier le caractère probable des bénéfices taxables futurs (32-63-743).
Les modalités et exemples développés ci-avant sont notamment inspirés des préconisations de l’ESMA.

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